Liturgie des temps de fêtes

cœur de toute démarche catéchétique ? La catéchèse ne s'accomplit pleinement — l'Eglise ancienne le savait — que dans la communion vivante avec l'Eglise en prière. 2. Le langage de la liturgie et sa source scripturaire La litu rgie s'exprime dans un langage qu i lui est propr e. Ce langage s' est façonné au contact de la Bible, car la liturgie procède de la fréquentation assidue du témoignage que les prophèt es et les apôtres ren dent au Sei gneu r vivant. Dans la méd itation de ce témoignage, la prière de l'Eglise puise les mots de son adoration et de ses requêtes, de sa louange et de ses supplications. Son langage s'y est façonné durablement. Dans son livre « La prière au cœur de la vie » 1 , Pierre-Yves Emery a bien montré que la liturgie n'est pas liée seulement aux thèmes de la Bible, mais aussi à son langage; s'il n'en était pas ainsi, la Bible « deviendrait au mieux un document ancien auquel on se réfère. Elle n'a ura it plu s d'imp act dan s l'espri t des ch rétien s ». Un e prédicat ion sera it tout à fait insuffisante si elle se contentait de répéter la Bible: elle a pour tâche de l'actualiser. La liturgi e, au contraire, a pour fonction de nous mainten ir dans la familiarité de la Bible, ce qui « précise et limite tout à la fois les transformations possibles du langage liturgique ». Ce langage qui lui est propre, la liturgie doit l'exprimer dans le contexte d'aujourd'hui. Or, un décalage réel et inévitable apparaît entre le langage de l'homme actuel et le langage liturgique. Non pas tant dans le vocabulaire, comme on le croit et le prétend souvent, mais dans l'intention même du langage, comme le montre fort bien Pierre - Yves Emery. En effet, le langage ordinai re, fort ement ma rqué pa r la sc ience, vise à être op érationnel, univoque, précis : la science, dans sa démarche, rompt en effet avec une lecture symbolique du monde et met Dieu entre parenthèses. Le langage liturgique, lui, est symbolique, à l'exemple du langage biblique : en lui, l'homme se comprend comme un être qui se reçoit lui-même de Dieu pour se donner en retour à ce Dieu duquel il tient tout. Ainsi, le réel n'est pas d'abord objet de connaissance scientifique, mais une réalité qui prend son sens à partir de son rapport à Dieu. « Cette contradiction entre deux langages dont l'un (celui de la Bible et de la liturgie) est comme refoulé sans qu'on puisse le faire disparaître, est une des composantes du malaise actuel de notre culture. » Ce décalage ne peut être réduit complètemen t: « il doi t êt re assumé comme une ten si on néc essa ire, même si elle est inconfortable ». En effet, le langage ordinaire risque toujours de se considérer comme la seule approche possible du réel. C'est pourquoi il ne faut pas vo uloir supprimer cette ten si on en usa nt, pou r la li turgi e, d'u n la nga ge qui en éva cue la dimen si on propre, façonnée au contact de la Bible et conservée par la tradition. Inversement, il ne faut pas que la tension se fige dans une juxtaposition des deux langages qui provoquerait, chez les croyants, « une sorte de schizophrénie spirituelle ». Une certainecommunication de la liturgie à la culture ambiante est nécessaire, comme il est nécessaire également que la vie profane et le langage quotidien s'ouvrent à la réalité dont témoignent la Bible et la li turgi e, c'est -à- dire à la réalité d'u n homme et d'u n monde quali fiés essentiellement par leur relation à Dieu. Dans ce sens, le langage liturgique a une portée « missionnaire ». Il est d'autant plus nécessaire de sauvegarder la spécificité du langage liturgique qu'à notre époque le langage courant subit une érosion considérable. Soumise à toutes sortes de pressions, « notre vie, notre pensée, notre parole les plus courantes sont constamment menacées de dégradation, d'aplatissement; elles tendent, par la pente la plus facile de la P. Y. Emery, La Prière au coeur de la vie, 1971, p. 176 ss. 9

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